Un corps flottant sur un trapèze
Inspiré du spectacle de Sofia Tsola.
Les spectateurs l’attendent en bavardant.
Le noir embrasse maintenant le cirque. La musique commence à s’effiler dans l’obscurité.
L’artiste est une femme. Elle se trouve déjà en haut de son empire. Elle inspire
et expire. Elle est fardée d’une combinaison transparente teintée çà et là de
fleurs noires. Au creux du chapiteau, elle voit d’en bas, le cirque s’offrir à
elle. Son trapèze ne bouge pas, c’est elle qui se balancera quand elle aura
décidé de commencer. La lumière se fait sur elle. Elle, elle ne voit qu’une
multitude d’yeux brillants la dévisageant. Et elle s’élance dans sa danse.
La trapéziste apparaît
dans le noir
Debout sur la
barre
qui porte son
poids.
Le premier basculement du corps est là,
Doucement
d’abord,
Enroulée
dans ses cordes de trapèze,
Elle
serpente l’air
S’habituant au
rien en dessous d’elle.
Rebascule,
première figure, tête
à l’envers,
La gravité
l’attire vers le bas,
désir de plonger, rejoindre
un au-delà.
Légère, elle
danse avec l’air,
Elle danse, tournoyante sur sa
barre,
avec le vide,
Sans le laisser
l’engloutir.
Tapi dans le
noir, on ne le voit pas mais
le trapèze est toujours là,
Rattrapant, retenant,
Son
corps flottant.
Elle fait
alors un pied de nez
à cet espace,
qui l’attire,
démesurément.
Balancelle
de haut en bas,
Légère, libre,
elle ricoche sur sa barre
Bondissante, envoûtante,
Elle
est une lumière dans l’obscurité,
Tresse ses
acrobaties,
Tressaute et
dessine
sa voltige, un solo
de trapèze fixe.
Première
pause dans les cabrioles. Debout, sur la pointe des pieds, elle est en symbiose
avec son trapèze comme un funambule sur son fil, testant la patience du public.
Et sa domination du vide.
Le jeu continue, avec lui,
le trapèze,
lui qui l’aide à réaliser
ce
mouvement figé
une chimère de
trapéziste.
Et pourtant,
Les spectateurs discernent
ces
ailes invisibles
Comme un
ange
qui tombe, sans
jamais
trouver de chute.
Espace
infini,
L’artiste, la
trapéziste se
balance,
Dans tous les
sens,
Elle saute une dernière fois, ouvre ses ailes,
encore une fois,
pour
s’offrir au public.
Cascades envolées,
Soubresaut
flamboyant,
Elle
disparaît
En s’effondrant
dans l’obscurité.
Elle vogue
dans cette sphère
Jusqu’à retrouver
son équilibre
premier, la pesanteur,
Hors du cercle de
scène.
Un tonnerre d’applaudissements l’envahit.
La danse de l’air est finie. La trapéziste remercie au sol ceux qui l’ont
accueillie. Son désir de monde flottant s’est maintenant dissipé. Mais marcher reste
une banalité. Et cette sensation de vide, tenace, qu’elle ressent, d’avoir les
pieds sur terre.
Pour voir les performances de Sofia Tsola : http://www.sofiatsola.com/
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